Je suis grand reporter. Trente ans que je couvre les guerres du monde. Au dÊbut, je ne savais pas ce qui m'attendait. Massacres, charniers, tortures et viols... J'ai plongÊ dans la nuit. Très vite, j'ai remarquÊ ces hommes que la guerre a rendus fous: hÊros terrorisÊ par ses cauchemars, ancien commando soudain muet ou vÊtÊran qui se tire une balle dans la bouche.
Ce mal, Êtrange, est aussi rÊpandu que tabou. Rwanda, Bosnie, Irak, AlgÊrie, Vietnam, Liban... De partout, des hommes reviennent brisÊs. Depuis ce jour oÚ ils ont rencontrÊ la mort, dans la gueule d'un fusil, le regard d'un ennemi ou les yeux d'un ami.
à Bagdad, mon hôtel a reçu un obus. J'ai vu un confrère couchÊ sur la moquette. à la place du ventre, il y avait une tache blanche et nacrÊe. Alors j'ai commencÊ une enquÃĒte qui m'a menÊ dans plusieurs pays. J'ai interrogÊ les combattants et les psychiatres, fouillÊ les livres, la peinture et les films, l'ethnologie et la mythologie. Une chose est sÃģre : si on n'affronte pas la douleur de la guerre, elle nous tue. Il faut plonger en nous-mÃĒmes et se reconstruire pour trouver la guÊrison. Oui, on peut en mourir, survivre et revivre. Et ce mal ne nous parle que de vie et d'humanitÊ.
Ceci est ma plus grande enquÃĒte.